STALAG IIB   HAMMERSTEIN,   CZARNE en POLOGNE

CAMP de PRISONNIERS de GUERRE 1939-1945 en POMERANIE

 

Photos et texte

transmis par sa petite fille

 

Patricia

 

aubert.durot@orange.fr

 

Odon PAUTRE

            

matricule 63 073

 

 

" Mon grand-père, peu avant son décès en 1989, m’avait raconté ce qu’il lui était arrivé lors de la guerre 39-40.

J’avais recueilli des informations dont je vous fais part.

 

Odon PAUTRE, né à Vauvillers dans la  Somme le 4 août 1907, d’origine agricole, tenait un café-épicerie, était marié et père de deux enfants 10 et 8 ans lorsqu’il  partit pour la guerre en septembre 1939.

Direction LAON- CHARLEVILLE. Il est fait prisonnier à ROCQUIGNY dans les Ardennes en mai 1940.

 

Quinze jours de marche, direction l’Allemagne, traverse le Luxembourg puis départ en wagon IIB vers la  Poméranie.

 

 

Il travaille comme ouvrier agricole dans une ferme de 750 ha près de la  Baltique, à sept kilomètres de la mer.

Il est libéré par les russes lors de l’offensive du général de Joukov en 1945.

Il est envoyé avec d’autres prisonniers à pied jusqu’à Varsovie, Cracovie ; il reste deux mois en camp avec pour toute nourriture du millet et poisson salé (27000 hommes).

Rapatriement de Russie en train jusqu’à Magdebourg, huit jours de train vers la  Belgique.

Arrivée dans un camp, camions venus chercher les prisonniers direction Lille. Il a entendu parler Français autour de lui pour la première fois depuis cinq ans. Lille-Albert par le train : retour de la guerre 26 juillet 1945.

 

Mon grand-père s’est tenu à des propos précis quant aux faits et aux dates, mais peu de choses sur ces cinq ans passés là-bas sinon que ses compagnons de captivité et lui s’essayaient à saboter le travail dans les champs, pensant ne plus être  en Allemagne l’année d’après. Evidemment, ils subissaient les représailles l’année suivante lorsque les allemands découvraient des cailloux ou des branchages dans le foin ou la paille. Il m’avait également dit qu'à la libération par les russes, cela ne s’était pas passé comme il l’espérait.

« Ha, ma t’chiote, (dans son picard) les russes, c’étaient des brutes, Je ne les aime pas ceux-là, ils ne font pas de sentiments »

Mon grand-père est décédé en 1989, mais dix ans plus tard, mon fils faisant un stage agricole en  Pologne, près de Stettin, j’ai réalisé que mon grand-père me parlait souvent de l’Oder, et que le fleuve était tout près de Stettin. Nous avons décidé, mes parents, mon  époux et moi-même de nous rendre là-bas  pour  voir notre fils et également faire une sorte de pèlerinage.

 

Monsieur Constantin RENARD, lui aussi dépendait du camp HAMMERSTEIN IIB ; Il habitait Harbonnières dans la Somme à côté de Vauvillers. D’ailleurs, leur amitié ne s’est jamais démentie. Au retour de la guerre, ils se rencontraient souvent, et évoquaient leurs souvenirs.

Ils se considéraient comme des frères. Ce monsieur qui était déjà âgé, et aujourd’hui décédé également, m’a fourni de nombreuses  explications quant à leur détention et à leur vie quotidienne.

Il m’a précisé le nom du camp : Hammerstein IIB

Arrivée en Poméranie le 1er juin 1940, arrivée à STRIPPOW (STRZEPPOWO) le 21 juin près de Koszalin. 32 prisonniers sur des pailles de seigle.

Il y avait à chaque extrémité du village une grosse ferme, l’une de 750 ha, l’autre de 370 ha, ferme dont le nom ou le propriétaire s’appelait  BLANCKENBURG ? Grand-père a été quelques semaines dans la ferme de la grande maison blanche (voir photo) puis a passé le reste de sa captivité dans la seconde ferme au bout du village.

Lors de notre périple, nous n’avons pas vu de maison d’habitation mais nous n’avons pas osé nous aventurer plus loin. Il reste deux bâtiments dont un servait de dortoir aux prisonniers (voir photos).

Dans cette ferme, il y aurait une petite rivière dans la cour ; nous n’y avons pas prêté attention, peut-être existe-t-elle encore…

 

Mon grand-père faisait office de cuisinier, le contexte était particulier ; d’après ce que j’ai compris, le propriétaire ou le régisseur de la ferme, réfractaire au gouvernement d’Hitler, était emprisonné, et seuls, sa femme et ses enfants étaient dans les lieux.

 

 

On m’a parlé d’une certaine Véra, fille du régisseur. Apparemment, mon grand-père faisait les corvées domestiques et je ne sais pas si son sort était mieux ou pire que les autres. J’ai tendance à croire qu' en cinq ans, des amitiés entre lui et les gens du village sont nées, malgré les horreurs de la guerre.

Son compagnon de captivité m’a raconté qu’ils se retrouvaient le soir dans le café du village, il est toujours existant (voir photo) café WEMMER au milieu du pays. Il y avait aussi un temple (église) dans le village sur une butte avec le cimetière à coté (voir photo)

 

Un soir, mon grand-père vint retrouver ses compagnons au café inquiet de savoir que le propriétaire ou régisseur de la ferme avait une permission pour revenir voir sa femme et ses enfants.

Qu’allait-il penser de ce français qui était dans sa maison ?

Le lendemain soir, il revint au café et donna à son compagnon un cigare «  tiens, lui dit-il, c’est l’allemand qui m’a donné deux cigares pour qu’on les fume ensemble. Il m’a dit avant d’être obligé de repartir qu’il s’inquiétait beaucoup pour sa femme et ses enfants et qu’il me remerciait d’être présent et qu’il était plus rassuré.

 

A l’arrivée des russes, mon grand-père était dans la cour de la ferme, le fils de la maison non loin de lui. Les russes ont voulu emmener les chevaux dans l’étable. Le garçon de 15 ou 16 ans s’est interposé, se mettant devant.

Les russes ont tiré et l’ont tué devant mon grand-père atterré, un gamin qu’il connaissait depuis cinq ans.

J’ai su par son compagnon, qu’il l’a pris dans ses bras, et l’a ramené à sa mère.

C’était un moment terrible.

 

Ce bref témoignage pour laisser à mes enfants, petits-enfants et arrière petits-enfants

La mémoire de notre famille et leur apprendre qu’en temps de guerre, leur ancêtre, mon grand-père qui était un homme droit et honnête a été plusieurs fois mis en joue pour exécuter des ordres qu’il refusait.

La vie ne tenait qu’à un fil. La chance était avec lui. Il  est revenu. "

 

 

 

   

 

CARTE du RETOUR

 

6 mars 1945  départ de STRIPPOW (STRZEPPOWO) &o heures du matin            

9 mars            KORLIN ‘(KARLINO)

10 mars          BUBLITY   

13 mars          SCHLOCHAU( CZLUCHOW)

14 mars          KAMIEN   2 heures du matin puis NAKTO

15 mars          BROMBERG (BYDGOSZEG)

17 mars          PLOMBERG

                         LODZ

6 avril 1945    GUERRE FINIE

26 juin 1945  SHEPETOVKA ( russie)

27 juin            LAMBERG (LWOW)

28 juin            MEDBIKA   10 heures du matin

                         puis RZESZOW, VISTUL, KRAKOW

29 juin            KATOWICE

30 juin            MARKFTADT (MARKSTADT)  

                        camp disciplinaire près de BRESLAU

1 et 2 juillet   BRESLAU

juillet          BRESLAU

juillet          SAGAN ( ZAGE N)

                        FORST  nouvelle frontière polonaise puis COTTBUS

5 juillet           WITTENBERG (BIALOGORA)

6 juillet           MAGDEBURG       pas de ravitaillement

10, 11, 12 juillet  ALVERSDORF     anglais français     wagon 193.82

13 juillet        HANNOV

14 juillet        DORTMUND

15 juillet        BELDURG    DISNENCKE

                       MEUSE l’après-midi

                       GENNEP            2 heures,  frontière hollandaise

                       ANAFOREN      café, lait, deux biscuits

                       ACHEL               8 heures,  frontière belge

                       HASSELT          9 heures,  café, gâteaux

                       BRUXELLES

                       MONS

                       VALENCIENNES     5 heures du matin, pain, vin, viande

                       DOUAI

                       ARRAS

                       LILLE –ALBERT par le train

 

26 juillet 1945  VAUVILLERS (Somme)

retour de la guerre, enfin en famille depuis septembre 1939

 

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