"Au
printemps de 1942, pour la majorité des prisonniers de guerre, allait
bientôt s'achever la deuxième année de captivité. Deux ans loin des
nôtres ! Deux ans loin de la France ! Qu'on le voulût ou
non cela commençait à peser fortement. Même les plus endurcis
éprouvaient un réel besoin de rapprochement avec la Mère Patrie. C'est
à ce moment-là qu'une idée germa et se répandit dans le camp sans que
l'on ait jamais su qui en était l'auteur.
Il
s'agissait de rappeler à la France que, malgré leurs souffrances, ses
fils ne l'oubliaient pas et entendaient participer à la réparation des
ruines causées par la guerre. Comment ? En finançant la reconstruction
d'une école détruite au cours des combats de 1940.
Cela
se passait au STALAG IIB, en Poméranie orientale au-delà du fleuve Oder
(ou Odra) à Hammerstein (aujourd'hui Csarne). Les instituteurs du camp
reprirent l'idée à leur compte et s'en firent les ardents promoteurs.
On étudia l'affaire sous tous ses angles et, quand elle fut reconnue
viable, on décida d'entamer les démarches nécessaires. C'est-à-dire
qu'on s'adressa au Chef de l'Etat français (à cette époque le Maréchal
Pétain) par l'intermédiaire de l'Homme de Confiance français du camp et
de la mission Scapini.
Notre
projet reçut un accueil favorable. Après consultation des Inspecteurs
d'Académie du Pas de Calais, des Ardennes et de la Somme, le Chef de
l'Etat Français nous répondit en nous donnant le noms de trois villages
(un de chacun des trois départements mentionnés ci-dessus ) en nous
laissant la liberté de choisir nous-mêmes.
Le
Bosquel fut retenu pour les raisons suivantes : les instituteurs
présents au camp comptaient dans leurs rangs deux collègues de Meurthe
et Moselle, Roger Béry et
Lucien Petitgand qui avaient pris part aux combats du printemps 1940
près du Bosquel. Mais il y avait aussi parmi nous Roger Guérin
instituteur de Seine Maritime dont les grands-parents habitaient Le
Bosquel. Pendant quelques années le jeune Roger avait fréquenté l'école
du Bosquel, celle qui avait été détruite en 1940.
Par
l'intermédiaire de leur journal (sous surveillance allemande) tous les
Prisonniers de Guerre français du Stalag IIB sont informés et
sollicités de verser leur obole pour la réalisation du projet. Tout va
bien et la somme fixée est atteinte avant la fin de la captivité et
transférée en France sur un compte spécial.
Allions-nous
donner un nom à cette école ?... et lequel?... Considérant qu’à cette
époque il y avait environ 20 000 Français au Stalag IIB, chacun versant
sa participation était censé apporter sa pierre à l'édifice, d'où le
nom des : 20
000 PIERRES.
René LEPOITTEVIN, dernier
Président de l'Amicale du Stalag IIB.