Informations et photos transmises
par son fils Roger GAGNE
Jean-Pierre GAGNE originaire de Cayres en Haute Loire est fait prisonnier le 16 mai 1940
dans la région de Charleville au sud ouest de Rimogne. Après avoir
parcouru à pied environ 130 km pour rejoindre Bastogne, les prisonniers
sont mis dans le train le 29 mai 1940, à raison de 60 personnes par wagon, en direction de la Poméranie orientale. Ils arrivent à Hammerstein le 1er juin 1940.
Après
les formalités d'admission, Jean Pierre GAGNE n° 61007, se retrouve
affecté dans un kommando de travail dans les fermes de LUPOW aujourd'hui Łupawa, kreis Stolp, qui se trouve environ à 27 km à l'est de Słupsk.
Il
semble avoir passé la plus grande partie de sa détention en cet
endroit, dans les kommandos n°573 (ou 513 ?) à Noël 1942, puis au n°
220 où on le trouve en novembre 1943. D'après les photos, le groupe
faisant partie du kommando varie de 19 à 30 personnes.
Photo du kommando en 1942, en arrière plan le moulin dans lequel ils vécurent
Jean-Pierre Gagne 3e au 3e rang depuis l'avant

Jean-Pierre Gagne 5e au 3e rang depuis l'avant en partant de la gauche
15/09/1940


photo non datée avec un accordéonniste
Jean-Pierre GAGNE 6e au 3e rang depuis l'avant
Le
grand bâtiment en brique qui apparaît en arrière plan de plusieurs
photos est un ancien moulin sur la rivière Łupawa, qui existe
toujours et a été reconverti en centre d'agrotourisme populaire sous le nom d' Agroturystyka "Stary Młyn" / pole
On
peut en famille visiter le moulin-musée dans une ambiance bon enfant, y
manger, y dormir, y faire du cheval et aussi du kayak sur la
rivière Łupawa. Les très nombreuses photos publiées par les clients de
l'établissement permettent en analysant la disposition des briques qui
encadrent les ouvertures, d'identifier précisément celles devant
lesquelles furent photographier les prisonniers. On peut donc affirmer
qu'ils vécurent dans le moulin dans une partie qui leur était réservée.
- Cet
ancien moulin construit en 1915 ou 1925 était mu par une imposante
roue à aube que l'on aperçoit sur la carte postale et qui existait
encore pendant la guerre. En 1982, une turbine de type Francis et un
alternateur de 50 kw y furent installés.
- Cette
modification entraina la disparition de la roue à aube qui fut
remplacée par une construction accolée au bâtiment principal pour
abriter le nouvel équipement. Une probable modernisation du moulin fit
aussi apparaître une importante excroissance en toiture.
Carte postale d'époque
de Łupow. En bas à gauche, le moulin près duquel est la
photo de 1942


site facebook
https://pl-pl.facebook.com/Stary-M%C5%82yn-Krzysztof-Baran-328996657167008/

Durant
la guerre, la façade côté cour du moulin était probablement moins encombrée, car depuis,
elle a vu l’adjonction d’un porche devant de la porte d’entrée
et plus à droite, d’une "véranda" dans laquelle on
sert à manger. Les groupes de prisonniers ont été photographiés
face aux fenêtres situées à droite de la véranda, sachant que
l’une d’entre elles se trouve maintenant dans la véranda.
Les
cloisonnements intérieurs semblent avoir été conservés tels que
les prisonniers les connurent à l’époque.
Dimanche matin 14 novembre 1943,
en accrochant une remorque au tracteur, un accident se produit
entraînant une double fracture du bras gauche de Jean-Pierre. D'abord
soigné par le docteur Dreihaus de Lupow, il est dirigé le lendemain 15
novembre sur l'hôpital militaire des prisonniers de guerre
d'Hammerstein.
Le
Wachman fait son compte-rendu pour l'assurance et l'homme de confiance
qui était René THARREAU fait également le sien. Le médecin de l'hôpital
prescrit un traitement du 15/11/43 au 06/01/44 avec plâtre, massages,
rééducation, et 14 jours de "ménagement" à la reprise du travail.


La famille Puttkamer de
Lupow pour laquelle travaillaient les prisonniers.
Très tôt Lupow fut la
propriété d’importantes familles nobles allemandes : les
Tessen et Puttkamer. Et finalement, c’est Hans-Jesko von Puttkamer
(° 1908, † 1966)
qui hérita en 1931 du Majorat de Lupow de son grand-oncle Bonin. La
propriété comprenait initialement environ 3.500 ha et le château
Canitz. Hans-Jesko céda des terres pour réaménager la ferme, et la
transformer en ferme modèle. Le site internet de la grande et
illustre famille Puttkamer nous indique le détail des biens qu’ils
perdirent sur Lupow lorsqu’ils furent expropriés après la
guerre. Compte tenu de l’importance des chiffres, une partie des
surfaces se situaient sur des localités proches de Lupow dont on
connaît les noms.
Nous y apprenons aussi
qu’Hans-Jesko Puttkamer, qui avait le même âge que Jean-Pierre
Gagne, était le propriétaire du moulin ou était logé le Kommando
de prisonniers. L’importance des surfaces boisées nous explique
aussi les chasse aux chevreuils et les plantations d’arbres dont
parle Jean-Pierre dans ses notes.

"Schloss
Canitz", résidence du propriétaire ?
Après
la guerre, "Château Canitz" qui était à la fois une
ferme et une résidence bourgeoise baroque du 18ème siècle fut
laissé à l’abandon puis démoli dans les années 1980 sans que
l’on puisse trouver plus d’informations.
Les
cartes actuelles mentionnent encore sa position de l’autre côté
de la rivière Łupawa, à quelques 300 mètres du Moulin. Situé
entre la rivière et la route 211, un portail donnant sur la route
semble permettre l’accès au site de l’ancien château.
L’ancien
plan qui date d’avant guerre montre un bâti relativement
important, à la fois dans la zone proche du château, mais aussi le
long des 2 rues, parallèles à la route 211, qui rejoignent la rue
principale du village. Cela signifie que, près des bâtiments
d’habitation, se trouvaient certainement des écuries avec des
chevaux, des hangars de stockage de fourrage et de matériel et peut
être aussi d’autres bâtiments d’élevage comme peut le laisser
penser l’inventaire de la page précédente. C’est aussi ce que
semble confirmer Jean-Pierre lorsqu’il écrit au 22 janvier 1941
« On travaille de l’autre côté de la ferme » que
l’on pourrait traduire comme étant « de l’autre côté
de la 211 » qui, à l’époque, devait être un chemin.
D’après
les vues satellitaires, il ne reste actuellement plus rien dans la
zone où se situait le Château. Plusieurs photos anciennes montrent
une belle cour centrale entourée de bâtiments massifs. Le maître
des lieux vivait-il là avec sa famille ? Le fait qu’il est été
destinataire du compte rendu d’accident de Jean-Pierre, sur lequel
on trouve son nom, le laisse penser.

Hans-Jesko
von Puttkamer avait sans doute peu de contacts directs avec les
prisonniers dont le travail devait être organisé par un chef
d’équipe en relation avec le Wachman (garde).
La
photo ci-dessous de mauvaise qualité est intéressante. Elle est
prise le 31 mai 1942 devant une haie très fournie, lors d’un
concert donné par 3 de 21 prisonniers, "encadrés" à
gauche et à droite par 7 civils. Il se pourrait qu’elle ait été
prise à la "ferme", au château Canitz, en présence de
von Puttkamer debout à droite. Il est alors âgé de 34 ans, et ses
traits rappellent ceux sa photo d’identité publiée sur le site de
la famille.

Les
copains de détention cités dans les notes de Jean-Pierre.
Papeureux Jean "Saint-Hilaire la croix
par Combronde. Puy de Dôme
Arnal Albert "Vieux. Cabuzac sur Cère.
Tarn".
Toamen Marcel "51 rue du Commandant
Beaurepaire. Dreux. Eure et Loir".
Mavel Jean-Marie "Saint Germain
l’Herm. Puy de Dome
Trébossen Victor "Moulin Morio à
Plaudren près de Vannes Morbihan".
Tharreau René "61 rue lyonnaise.
Angers. Maine et Loire". (Homme de confiance)

A gauche : Photo
datée du 19 septembre 1940, peu de temps après son transfert
d’Hammerstein à Łupow.
A droite : Photo
datée du 26 juillet 1942. Jean-Pierre et son meilleur copain. On les
voit souvent l’un près de l’autre sur les photos.
L'interminable retour vers la FRANCE
Les prisonniers sont libérés le 8 mars 1945 par les russes Il s'en suit un incroyable voyage retour par
Lotz Łódź, Varsovie Warszawa, Brest en Biélorussie, Chepetovka en Ukraine en ukrainien : Шепетівка où il passe 2 mois en camp de transit en même temps qu' Odon PAUTRE du même stalag.
Sa nouvelle adresse est " 8e compagnie matricule 2043. Camp de transit n° 187 Chepetovka URSS. "
Puis sans qu'ils se connaissent il fait les mêmes étapes les mêmes jours qu' Odon PAUTRE, retour par la Pologne, Cracovie Kraków, Breslau Wrocław et enfin l'Allemagne, La France.
Il arrive au Puy en Velay le 19 juillet 1945 soit 4 mois et 10 jours après son départ de LUPOW, et presque 6 années après sa mobilisation.
stalag2b@free.fr
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