HAMMERSTEIN
XIX
Kommando 922 - Zamborst " Antreten ".
Encore 4 copains sont désignés pour la même destination. Ainsi nous
sommes à 10 Belges pour entamer ce voyage. Noter les numéros, fouilles,
et autres "formalités" nous retiennent encore un certain temps, et puis,
une fois de plus, la sinistre porte s'ouvre. Tout comme il y a huit mois
d'ici un wagon " bestiaux " nous transportera vers l'inconnu. A tous les
trains voyageurs sont accrochés quelques spécimens de ces wagons, le
moyen de transport idéal pour les prisonniers.
NEUSTETTIN,
nous mettons pieds à terre pour changer de train - direction JASTROW. Ce
que nous tenions comme impossible se réalise car nous devons prendre
place dans un wagon ordinaire. Entassés dans un coin et solidement
gardés, en passant par Ratzebuhr et quelques autres communes, nous
sommes en route pour Jastrow. Cette petite ville est située sur le
croisement des routes et chemins de fer et vers Schneidemuhl, Flederborn
et Tempelburg.
Nous changeons de train une fois de plus pour monter dans celui qui nous
déposera à Zamborst, la première gare sur la ligne
Jastrow-Tempelburg.
Ce patelin est situé à environ
40
Km Sud-Ouest de Neustettin et à 7 Km
de
Jastrow.
Zamborst
ressemble à une tête d'épingle dans ces immenses champs de la plaine
Poméranienne.
Immédiatement à la descente du train nous nous demandons si nous sommes
bien à destination car à part le bâtiment de la gare aucune autre
habitation n'est en vue. Cette gare semble désespérément perdue dans les
champs, d'ailleurs le chemin de fer à voie unique ne prend qu'un minimum
de place.
Le terrain, plat pour la plus grande partie, présente ici et là des
petites vallées assez profondes. Dans la plus grande de ces vallées est
situé Zamborst, quasi invisible à une distance de plus de 200 mètres et
distancée de la gare d'une bonne dizaine de minutes.
Une petite chaussée de troisième catégorie nous conduit jusqu'à l'entrée
d'une grande ferme. Le "Rittergut Finck" se situe au bord de la vallée
et devant son entrée la route se coupe en patte d'oie dont la partie
gauche disparaît directement dans la vallée tandis que celle de droite
longe la vallée sur une distance d'environ 500 mètres pour la traverser
en suite afin de rejoindre la première route sur l'autre pente de la
vallée. Ainsi le réseau routier se limite à une route en forme ogivale,
contre laquelle les fermes, grandes et petites, s'appuient.
La petite rivière du fond de la vallée, divise le patelin en deux
parties.
A gauche de la ferme Finck et dans le fond de la vallée se trouve la "
Brennerei ", l'installation où l'on tire de l'alcool des betteraves
sucrières et des pommes de terre.
En Poméranie chaque patelin qui se respecte possède d'ailleurs sa "
Brennerei ".
A gauche de cette installation le flanc de la vallée est
particulièrement fertile. On y trouve tous genres de buissons et
d'arbustes. Sur ce flanc et à une petite distance nous trouvons quelques
petites maisons d'ouvriers de la ferme, qui sont situées à la
limite du patelin car derrière elles commence une immense Forêt appelée
: " Buchenwald ". En face de ces maisons mais sur l'autre flanc, une
seconde grande ferme, appelée " Kadow " d'après le nom du propriétaire.
Ces deux fermes dominent en quelque sorte le patelin et ses champs
environnants car les quatre cinquièmes des bois, des terrains, et mêmes
des habitations du lieu leur appartiennent. A " Finck " travaillent déjà
22 prisonniers français, à " Kadow " 10.
Le " Schloss " comme les indigènes appellent le " Rittergut ", est un
bâtiment fort imposant pour la contrée. Il compte 36 fenêtres de face,
une vestibule au milieu et une entrée large au dessus d'une rangée de
marches qui descendent vers un chemin en gravier contournant une petite
pelouse.
A gauche du château, caché derrière une haie, se trouve un petit
bâtiment, l'ancienne buanderie, qui héberge les 20 Français. Pour
l'occasion il est entouré d'une clôture en fil de fer barbelé, haute de
3 mètres, et ses petites fenêtres sont garnies de barreaux en fer.
A droite du Château et une vingtaine de mètres vers l'avant se trouve un
autre petit bâtiment dont une moitié était l'ancienne habitation du
jardinier, dorénavant le "logement" des Belges. L'autre moitié sert
d'abri à la volaille de la basse-cour. A la bordure des 3 autres côtés
de la cour se trouvent de très grands bâtiments, l'un servant d'étables
et écuries pour les vaches et les chevaux, l'autre étant réservé aux
cochons, veaux, moutons et autres petites bêtes. Face au Château, des
granges immenses, et hangars pour l'outillage.
Dans ces grandes constructions on trouve des ateliers tels que la forge,
la charronnerie, la meunerie et autres. Une sortie donne sur la route du
patelin et une autre sur celle de la gare.
Notre nouveau " Palais ", appelé par nous " la piaule " comprend une
petite chambrette à chaque côté du corridor, celle de gauche étant
destinée à la sentinelle tandis que celle de droite servira de cuisine
pour nous. A la fin du corridor se situe la vraie "piaule" d'environ 7
mètres sur 3 et garnie de 5 bacs de couchage, superposés, ainsi que de 2
bancs et une longue table très étroite, placée sous les 2 petites
fenêtres.
Notre impression à l'arrivée dans cette " Chambre " est plus tôt triste,
pourtant nous ne sommes pas des gâtés! Petit, trop petit, sombre et
humide, d'un plafond tellement bas que ceux qui dorment au second étage
des bacs ne sauront jamais se redresser sur le sac à paille.
Robert, le plus âgé de notre groupe fera le cuistot. Dans la cuisine il
ne dispose que d’une feu et deux casserole, ce qui ne l'empêchera pas de
se débrouiller magistralement après quelques jours de "mise en train".
Qui mieux que nos amis Français pourraient nous renseigner sur les
habitudes et les moeurs des indigènes. C'est ainsi que nous apprenons
que la ferme est gérée par un " Inspecteur " qui d'ailleurs a la
surveillance également de la ferme " Kadow ".
La famille Finck se compose de la " Gfnädige Frau " une veuve de 70 ans,
et sa soeur, qui toutes deux habitent le Château, un fils est officier à
l'Armée et un second habite une ferme quelque part en Poméranie.
Un prisonnier doit journellement réceptionner à la cuisine du Château
les rations de pain et de marmelade pour toute la communauté. Le
cuisinier peut, lui-même, enlever les pommes de terre du silo. Des
légumes il en recevra du jardinier qui n'est autre qu'un prisonnier
Français.
Tous les jours des pommes de terre, et en quantité !!! L'eau nous vient
dans la bouche.
Une fois par semaine généralement le dimanche nous recevrons une ration
de viande.
Le traitement est comme partout ailleurs, brutal, sans pour cela être
insupportable.
Le travail commence à 7 H du matin, une heure et demie d1interruption
à midi, pour terminer à 19:30 H en été, et à la tombée de la nuit
pendant la période hivernale.
Les civils Allemands qui travaillent à la ferme, incluses les femmes et
les filles, sont des vrais Prussiens, à de rares exceptions près.
Au cours de cette première soirée nous recevons la visite du " Herr
Inspektor " qui désire connaître l'homme de confiance des Belges. Mes
copains insistent pour que je continue à être leur porte-parole,
d'ailleurs estiment-ils, vous avez déjà un entraînement dans ce jeu.
Nous organisons notre " piaule " tant "bien que mal. Médor, notre
sentinelle, appelée ainsi pour sa mine féroce et ses expressions
Prussiennes, ne nous quitte pas d'une semelle. Il assiste à
l'installation et il veut manifestement savoir à quel genre de " bétail
" il a à faire.
Les Français ont baptisé leur sentinelle du nom de " Pèlerin " suite au
nombre respectable de kilomètres qu'il parcourt en exécution de son
service de surveillance.
Les champs des deux fermes " Finck " et " Kadow " sont exploités en
commun par l'ensemble du personnel, sous la direction de " l’inspektor
".
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